Edith Payer joue de mises en scène. Comme voulant échapper à l’inéluctabilité du temps, l’artiste récupère les objets du quotidien mis au rebut. Le travail n’est pas recouvrement mais aussi création, les objets collectés sont extraits de leur contexte et mis à disposition d’une expression nouvelle n’étant pas en manque de sens. Pour son exposition au Cube à Rabat, elle ouvre le champ à la problématique de l’objet et de la collection ethnographiques rencontrée au musée du quai Branly et développée lors de la résidence à la Cité internationale des arts à Paris.
Qu’il s’agisse de la tête d’un mouflon façonnée à partir d’un pantalon ou d’ustensiles regroupés dans une collection mis sous vitrine, l’objet de notre environnement matériel devient muséographique, passe de la sphère du quotidien à celui du musée. Semblable à l’action de l’ethnographe, Edith Payer récupère objets et vêtements trouvés dans les rues d’un Paris populaire. Elle les repense pour leur donner fonction, non plus d’objets usuels, mais d’objets d’exposition. Sacralisés – les faisant socles, les joignant à une collection, les mettant dans des boîtes selon le mode de la classification, reproduisant les graffitis exposés sur le bâtiment -, les objets se muent et deviennent oeuvres.
En ce sens, dans les musées, rien ne peut être laissé au hasard, même les outils qui portent l’objet importent. L’intérêt esthétique engage à la mise en scène, au risque d’y voir essentiellement l’aspect plastique au détriment de l’aspect scientifique ou usuel. Pour Edith Payer, l’oeuvre ethnographique est bien un témoin d’une époque et d’un lieu et, dans son cas, expressive de notre temps. Voyons ces rideaux et socles sur lesquels nous pouvons deviner le nom de grandes marques ! Selon une tendance à sacraliser la « coquille », les objets et collections se noient dans une institution qui veut du luxe, du clinquant au point d’oublier là encore l’essentiel, du moins sa fonction première.
L’exposition d’Edith Payer au Cube – independent art room est l’expression de ce développement entre Paris et Rabat. En construisant son propre musée ethnographique, apparenté à l’art premier, l’artiste nous donne l’occasion de redécouvrir les objets de notre quotidien.
Documentation
• Livret de l’exposition
• Communiqué de presse
Presse
• « L’artiste autrichienne Edith Payer expose ses installations au Cube à Rabat » in Blanee