Lucie Laflorentie
Architecture et paysage
« L’envers du décor comme élément du décor. »
Je ne puis jamais, parlant cinéma, m’empêcher de penser « salle » plus que le film. – Roland Barthes
Le travail de Lucie Laflorentie s’est fondé sur l’articulation entre son approche du dessin et son expérience du paysage (Canyon, 2005).
Hors de l’espace connu de l’atelier la jeune plasticienne réinterroge sa perception de l’espace, pose un rapport mouvant entre elle et l’environnement.
De la fenêtre ouverte sur le monde au cadre omniprésent, Lucie Laflorentie ne cesse de déconstruire et reconstruire l’unité de l’image dans une mise en espace particulière. L’espace d’exposition devient le paysage de tous les possibles et de tous les points de fuite.
Ses installations architecturées conjuguent dépouillement bricolé et mise en abîme de la vidéo. Un jeu s’instaure entre espace de projection et de représentation, un nouveau partage du monde de l’image.
L’installation Springkler (2008) traduit avec délicatesse et sobriété ce monde poreux où le module cagette devient l’élément constitutif d’une cabane ouvrant sur un paysage existant.
Le mythe de la cabane « in progress » est réinventé par la captation vidéo d’une lumière visible (arc-en-ciel) en perpétuel évanouissement. La machine (Springkler, moniteur) devient un écran, un intermédiaire elle aussi plus ou moins trompeur. Le trompe-l’oeil se baroquise avec son effet détail-miroir dans Dehors (2008). Cette installation paradoxalement très « less is more », comme toujours chez cette plasticienne, impose sa présence monumentale dans une juste adéquation avec le contexte de l’exposition tel qu’il est.
Visible, invisible, fragmentation des plans, densification des volumes, c’est comme si le travail de Lucie Laflorentie se plaçait dans l’amorce de quelque chose ; quelque chose dont le cadre prédéfini, souvent posé comme une extension naturelle de la salle d’exposition (Veduta, 2008), capture notre attention pour mieux prolonger une expérience sensible et libre.
C’est comme dans une salle de cinéma, s’asseoir ni trop près, ni trop loin de l’écran pour mieux voir le dessin de la ligne d’horizon.
Bernadette Morales