ECHOS est une exposition collective qui invite six artistes à la rencontre de l’environnement examinant la place de l’Homme et son impact.
Aàdesokan Adedayo, Ayo Akínwándé, Younes Ben Slimane, Mohamedali Ltaief ainsi que Fatim Benhamza et Amine Oulmakki, alertent le public sur les problèmes environnementaux et se font ainsi l’échos des alertes provenant du monde des sciences. En abordant les problématiques de la gestion des déchets, les conséquences pour la nature et les êtres vivants et – malgré tout – l’espoir de s’en sortir, les artistes révèlent à travers différents médias comme l’installation, la photographie et la vidéo la réalité vécue en Afrique depuis le prisme environnemental.
Afin de prolonger l’échange avec le public et d’élargir les points de vue sur les thématiques, Le Cube organise également une rencontre avec des artistes et des spécialistes de l’environnement ainsi qu’une performance en collaboration avec la compagnie éphémère Irtijal Maroc.
Les défis du changement
Il était une fois dans un monde, une transformation ; le passage à une vie, le passage à une culture, le passage à un manoir, le passage à une machine, le passage de l’air à l’air de la pollution. Comment les paysages sont-ils passés du vert à la souillure et comment sont-ils devenus le printemps gris de cette époque.
En incarnant une machine d’un temps où en Afrique, l’art et les rituels s’épanouissaient en harmonie avec la nature, Stanley Ambrose révèle que « lorsque les éleveurs de l’âge de pierre sont arrivés en Afrique de l’Est il y a 3 500 ans, ils ont changé positivement les modèles de végétation, au lieu de dégrader la savane¹, comme on l’imagine souvent. (…) Leurs implantations abandonnées ont augmenté la diversité, la résilience et la stabilité de l’écosystème des prairies de la savane. »2 Dès lors, tout est de l’ordre de l’Histoire et le traumatisme d’une personne peut être ressenti sur les végétaux, les arbres, les sols, l’air, les déchets dangereux, et ainsi de suite, jusqu’à obtenir une liste correspondant au vocabulaire écologique. Ces interrogations soulèvent un drapeau rouge, mais pour l’Afrique et ses habitants, un drapeau blanc. ECHOS conteste le changement, la matière.
Dans cette dimension, l’histoire d’une personne a été pillée et transformée en ce à quoi elle ressemble aujourd’hui, une atmosphère de faim où les seules images repérées sont celles de bricoles.
Par conséquent, la biologie d’une personne s’est transformée en l’écologie perturbée des autres, et l’environnement d’une personne n’est plus qu’une litière où l’on peut semer un peu de joie. Où est le problème, quelles sont les conséquences et, d’un point de vue rhétorique, l’art contemporain est-il un rappel d’un air meilleur et d’une Afrique ensoleillée ?
Là où les eaux claires reflétaient les cieux et abritaient l’or, ivres et brunes sont-elles devenues à cause des ordures qui coulent en dessous et sur elles. Dans les parties les plus propres du désert, les dunes de sable servaient de ponts, pour y trouver des rimes de plastiques colorés de toutes formes et tailles. Climat Fools d’Ayo Akínwándé (Nigéria) abordent la question en saisissant le flux de la vie dans les marées du changement.
Waste identity – Bola Bola living d’Aàdesokan Adedayo (Nigéria) revisite l’étendue d’une situation. Dans une cohabitation avec une nature diminuée en fragments de soleil, apparaissent les paysages de couleurs, en harmonie avec les dunes de déchets. Un linéaire de temps est coupé pour l’éternité d’une cohabitation et d’un souvenir d’un temps, qui lentement s’efface, qui lentement fixe la limite du regard de ces gens. Une vision lointaine permet un dialogue entre l’habitat et l’inter-migration humaine, un microcosme personnel et l’espoir d’une meilleure identité, ou peut-être d’une meilleure Terre.
Ainsi, la série What do you choose to see de Fatim Benhamza (Maroc) retrace la théorie politique du recyclage, exposant et métamorphosant un espace en un choix ; un choix de vie ou un choix de mort silencieuse. Les ordures peuvent être un moyen de transcendance et une clé supplémentaire pour la renaissance d’un pays des merveilles.
Le voyage de Fatim Benhamza culmine dans le voyage de Younes Ben Slimane (Tunisie). Dans sa série All come from dust, une infinité de mouvements restitue la mémoire d’une pratique et du développement d’un peuple. En retraçant la fabrication de ce qui fera le nid d’un lieu, l’Histoire permet la préservation et narre le chemin d’un vivant, valorisant une pratique archaïque et la modernité de son parcours.
L’errance, le sentier, la promenade et la vue. Celui qui a été présent est désormais perdu, l’âne a tout vu, l’homme-âne, témoin de la perte écologique. Une promenade d’émerveillement qu’il s’est permis le long de la jungle de béton, il marche portant une vie sur son dos. Le lien éternel entre l’homme et la terre est l’olivier, un sauveur peut-être, un citoyen d’une survie c’est, l’âne humain, l’espoir. Vaine tentative de planter un arbre d’Amine Oulmakki (Maroc) reflète la fermeté et la paix de la victoire espérée de la nature.
Le lien éternel est là pour perdurer, avec la série Homrane de Mohamedali Ltaief (Tunisie). Un corps s’inscrit dans l’harmonie de la nature, la coexistence, la transparence d’un vivant et la connexion à la terre mère. Dans la nudité d’un corps, un discours s’installe le long de la quiétude d’une forêt et le cri fait écho à une intériorité. Un cri primitif que cette série récite, un retour à la terre qu’elle cite, la nécessité de ce qui fait de nous des citoyens d’une forêt, d’une terre, d’une écologie.
1 Une savane ou savannah est un écosystème mixte de forêt-prairie caractérisé par des arbres suffisamment espacés pour que la canopée ne se ferme pas.
2 Matériels fournis par University of Illinois at Urbana-Champaign. Ecrits par Diana Yates. Note: Content may be edited for style and length. Fiona Marshall, Rachel E. B. Reid, Steven Goldstein, Michael Storozum, Andrew Wreschnig, Lorraine Hu, Purity Kiura, Ruth Shahack-Gross, Stanley H. Ambrose. Ancient herders enriched and restructured African grasslands. Nature, 2018; DOI: 10.1038/s41586-018-0456-9
L’exposition est réalisée en collaboration avec la Heinrich Böll Stiftung Rabat.
Documentation
Dépliant de l’exposition
Film par Younes Belrhazal, musique: « Family Tree » par Abdellah M. Hassak (courte version, 1 min 41 sec)
Film par Younes Belrhazal, musique de la vidéo « Homrane » par Mohamedali Ltaief (longue version, 3 min 30 sec)
Presse
« L’art interroge la menace environnementale » par Houda Outarahout dans Diptyk